Acteur bien étrange, à la personnalité réservée tout en étant en quête de rôles puissants et complexes ; homme sérieux basculant en un éclair dans l’ironie et l’espièglerie compulsive, acteur toujours dans le doute dont les principales influences : Dustin Hoffman, Patrick Dewaere, Robert De Niro, Robert Duvall, Christopher Walken, Gene Hackman, John Hurt et bien sûr, Jean Gabin, l’obligent à la mise à l’épreuve constante, au dépassement de soi perpétuel avec cette sincérité qui rend possible de toucher à universel comme à l’intemporel. Thierry Frémont a une passion : jouer des rôles, un talent : les jouer jusqu’au bout, sans concession, s’accordant bien peu de répit pour la vie « civile », sa vie privée que lui-même avoue « difficile, tant j’ai peu de temps à lui consacrer ». Depuis quelques années, le public peut enfin contenter son attente : l’acteur est sur plusieurs fronts à la fois (téléfilms, cinéma, théâtre), les critiques ne tarissent pas d’éloges. |
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Frémont est un puriste, qui opte pour des choix personnels et difficiles, loin, bien loin des mondanités parisiennes ou de la jet set. Son "danse floor" à lui ? Son appartement parisien ou noctambulisme rime avec activisme, celui qu’il a fait sien et qui consiste à toujours vouloir peaufiner, retravailler un rôle que d’autre, peut-être, ont occulté dès la sortie de plateau. « Je ne peux pas faire autrement que de retravailler mes personnages le soir, comme un besoin d’être à la fois tout en eux et en même temps de leur apporter ce qu’ils pourraient être de plus, c’est plus fort que moi… ». |
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Comme tout prédateur, le comédien choisit ses « proies », le temps ne lui fait pas peur et s’il faut parfois laisser passer quelques propositions ce n’est que pour mieux savourer à pleines dents, à pleine âme, une cible plus consistante. Car il y en a eu du temps entre son premier film « Les Noces Barbares » (où il obtient le Prix Jean Gabin) et aujourd’hui. Les débuts sont d’ailleurs prometteurs puisque son deuxième film : «Travelling avant» (de Jean-Charles Tacchella 1987) lui fait obtenir le César du Meilleur espoir masculin ce qui génère une rencontre importante avec José Giovanni aboutissant, en 1988, au film « Mon ami le traître ». |
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Bertrand Blier : « Merci la vie » 1991 ; surprenantes avec la comédie de Gérard Lauzier : « Le fils du Français »1999, voire mythiques : Brian de Palma : « Femme fatale » en 2002, mais non, il ne peut se cantonner au cinéma, pire, il avoue être tout autant amoureux du théâtre : « je rêvais de monter sur les planches, de me confronter à un public, de verser un « trop plein » en moi… Ce rêve était un rêve d’enfant ». Alors, après une première pièce (« Poil de Carotte » en 1982), qui le consolide dans son choix, il passe par la case « Cours Florent », écoute les conseils de Francis Huster et s’en va vite passer et réussir le Concours d’entrée au Conservatoire National Supérieur de Paris. Il n’a pas vingt ans. |
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Il fait également partie de la troupe qui remporte le Molière de la Meilleure Pièce de l’année 1997 avec « Kinkali », mis en scène par Philippe Adrien au théâtre de La Colline puis empoche le Molière du Meilleur Second rôle pour « Signé Dumas » en 2004, même si on n’a toujours pas vraiment compris pourquoi il n’a pas obtenu le Molière du Meilleur comédien puisque, à moins d’être tombé sur la tête, il paraissait évident que son personnage était un premier rôle… Et certain ne s’y trompent pas d’ailleurs, comme Roman Polanski, qui confesse avoir été « impressionné » par sa prestation (il campe le rôle d’Auguste Maquet, le nègre d’Alexandre Dumas) au point de lui proposer le rôle phare de « Doute », une pièce de John Patrick Shanley , celui d’un prêtre enseignant catholique soupçonné de pédophilie avec un élève de 12 ans dans le Bronx des années 60 (en 2006). |
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Entre l’année 2000 et aujourd’hui (2011), il joue dans pas moins de dix-neuf long-métrages et une quinzaine de téléfilms ! Comment fait-il ? « J’ai besoin de bâtir, d’être en action, en permanence, et de faire parti du « mouvement », au point d’anticiper parfois avec crainte qu’il ne s’arrête. C’est compulsif, je le sais, j’ai une boulimie intérieure qui m’impose, presque malgré moi (rires), de me fondre dans des personnages et des scénarios avec toujours autant d’appétit, comme si je n’étais jamais rassasié même si, au fond, j’ai également cette peur de manquer, peur probablement due à mes origines (modestes)…». Un « acteur-glouton » en somme, qui ne se permet ni de perdre du temps, ni d’accepter des propositions qui ne le toucheraient pas de manière profonde et sincère. |
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Quant à sa prestation de Pablo Picasso où, à l’instar de Francis Heaulme, il se grime, mute, fait siennes des attitudes du peintre au point d’en déconcerter les plus sceptiques, il obtient avant sa diffusion à la télévision (France 2 : « La femme qui pleure au chapeau rouge » de Jean-Daniel Verhaeghe), le Prix d’interprétation masculine au prestigieux Festival de la fiction de la Rochelle en 2010. Un acteur physique, donc, alternant des rôles parfois « très sport » tout comme d’autres confinant la métamorphose au rang d’exploit avec, néanmoins, et c’est aussi ici que le talent puise sa quintessence, des personnages sensibles, délicats à jouer, parce que dotés d’une psychologie complexe et compliquée à cerner. Ce que Thierry Frémont parvient à faire avec une naturelle modestie, tout en discrétion et bien loin de toute médiatisation. Parce que ce métier est sa vie, nous l’avons compris, intrinsèquement, au point que cela lui tient tant à cœur que, pour une fois, il se refuse de faire semblant ou d’en jouer…
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